1 Rois 8. 22 à 30 / 1 Pie. 2. 4 et 5 / Matt. 16. 13 à 19
« Que tes yeux soient ouverts sur cette maison… »
« Comme des pierres vivantes édifiez-vous… »
Qu’est-ce que l’Eglise ? Les textes que nous venons de lire, nous invitent ce matin à réfléchir sur la nature de l’Eglise, sa richesse, les différents aspects de sa mission, de sa constitution. Ils nous invitent à prendre conscience de sa force. Ils nous parlent aussi de ce qu’elle est réellement, ou de ce qu’elle devrait être. Ces textes soulignent également ce que doit être ou devrait être notre part dans cette construction, dans cet édifice spirituel que le Seigneur lui-même construit depuis des siècles. Alors que nous vivons des temps troublés, que le monde se cherche, qu’il peine à trouver la voie de la paix, la voie du respect de la création, la voie de la fraternité, l’église se doit plus que jamais, d’être la lumière qui éclaire, le sel qui donne de la saveur. Encore faut-il qu’elle soit Eglise au plein sens du terme. Encore faut-il qu’elle soit vivante, présente au monde, agissante, priante, ouverte à tous. Que nous soyons conscients de ce qu’est l’Eglise, de ce qu’est sa mission, de ce qu’est la responsabilité de chaque chrétien vis-à-vis de l’église.
1°) « Que tes yeux soient ouverts sur cette maison… »
A la lecture de cette belle prière de Salomon, on pourrait tout d’abord se poser la question : « Faut-il sacraliser les lieux de cultes ou pas ? La spiritualité peut-elle se passer de la « matérialité », de lieux particuliers ? » D’après le texte du livre des rois, il semble que non. La spiritualité a besoin de cadres concrets, de lieux, de temps pour s’exprimer. C’est dans ce sens que le roi David a souhaité bâtir le temple de Jérusalem. C’est pour cela que son fils Salomon l’a réalisé selon les plans et la volonté de Dieu. Certes, Jésus a donné une dimension nouvelle à la spiritualité, l’adoration, la prière. Il a bien dit à la femme samaritaine, que désormais, les vrais adorateurs adoreront Dieu en Esprit et en vérité et non plus dans tel ou tel lieu ; non plus à Jérusalem seulement. Que désormais, le culte serait lié directement à Dieu en Esprit. Tout ceci est vrai. Mais peut-on dissocier radicalement le Dieu du premier testament, de celui du second ? La nouvelle alliance en Jésus, n’a-t-elle plus rien à voir avec l’ancienne ? Dieu n’est-il pas le même hier, aujourd’hui et éternellement ? Il semble bien qu’il y ait une rupture entre les deux alliances, mais continuité aussi. Témoins toutes les références de Jésus aux prophéties, témoins tous les textes anciens qui nourrissent notre foi, sans parler des épîtres qui les interprètent. Alors, faudrait-il ne plus donner d’importance à des lieux de culte sous la nouvelle alliance ? Pas si sûr ! Jésus lui-même n’allait-il pas prier dans certains lieux à l’écart parfois ? Lorsqu’il a vu comment les marchands du temple avaient détourné ce lieu de prières de sa vocation, il ne leur a pas dit : « Ce n’est pas grave ! ». Non, il les a chassés ! L’Eglise a besoin de lieu pour se rassembler et pour rendre un culte à Dieu, l’écouter et prier.
Certes, à la suite des réformateurs, il ne faut pas « sacraliser » les lieux de cultes au point de croire que ce serait seulement là que Dieu serait présent. Dieu est présent partout et on peut le louer, l’adorer, le prier chez soi. Il ne faut pas sacraliser, mais il ne faudrait pas non plus banaliser ces lieux de cultes. Ils sont nécessaires à la rencontre, le partage, l’adoration, la prière et l’écoute de Dieu. Bien qu’il reconnaisse que le temple qu’il vient de construire ne peut contenir l’immensité de Dieu, Salomon prie quand même : « Que tes yeux soient ouverts jour et nuit sur cette maison… écoute la prière de ton peuple, lorsqu’ils prieront en ce lieu. Toi, dans les cieux où tu habites, écoute et pardonne ». Il y a bien une dimension spirituelle particulière lorsque les chrétiens s’unissent et se rassemblent pour prier. (cf « là ou deux ou trois… ») Il y a une dimension spirituelle spéciale, une présence de Dieu particulière lorsque l’église se rassemble en un lieu pour rendre un culte à Dieu.
2°) « Que tes demeures sont aimables… mon âme soupire et languit après les parvis de l’Eternel… » prie David au Ps 84
Au Ps 84, David prie, exprime le désir, la soif de s’approcher de Dieu. Il nous invite à nous aussi à languir ce lieu où les frères et sœurs se rassemblent pour louer Dieu, le prier, l’écouter, pour vivre un temps de communion fraternelle. Quelle joie de se rassembler pour rendre un culte à Dieu ! C’est tout ce que les cultes en lignes qui florissent çà et là, ne pourrons jamais donner. Souvent on entend aujourd’hui, que beaucoup de chrétiens se contentent de ces cultes en ligne. Ils sont si bien faits, avec de si beaux messages ! C’est si confortable ! Mais, ça n’engage à rien ! Ce n’est pas ça l’Eglise ! Certes, ceux-ci peuvent être des compléments utiles, mais ils ne pourront jamais remplacer la relation fraternelle, la joie de la rencontre, du partage, même si ces échanges paraissent limités. Les cultes en ligne sont certainement utiles pour les malades, les personnes âgées, ceux qui souhaitent les réécouter, les chrétiens persécutés, mais ils ne pourront jamais remplacer les cultes en présentiels. De plus, il semble que cette multiplication d’offres en ligne soit en train de favoriser une forme de spiritualité à la carte, un « consumérisme » spirituel, un individualisme spirituel. Ce qui est à l’inverse de l’église, de l’assemblée. « Vivement dimanche ! » devrait-on dire, que l’on se retrouve à l’église ! J’espère que cela est notre désir ! « Je suis dans la joie quand on me dit : allons à la maison de l’Eternel ». Avons-nous cette joie, ce désir de venir adorer, prier, écouter, ensemble, même avec des frères et sœurs différents de soi ?
3°) « Je bâtirai mon église… » dit Jésus à Pierre :
L’Eglise n’est pas seulement un lieu matériel, un rassemblement de chrétiens comme on l’a dit, mais elle est beaucoup plus encore que cela, elle est aussi et surtout une entreprise de construction spirituelle divine et invincible. C’est bien ce que Pierre a compris de ces paroles de Jésus : « Tu es Pierre… sur cette pierre, je bâtirai mon église ». Pierre n’a pas compris ici qu’il devait devenir le pape de l’Eglise ! Non, il a compris que l’Eglise devait être un édifice spirituel, composé de pierres vivantes, et que le Christ lui-même bâtirait cette Eglise. Dans sa première épître, il écrit aux chrétiens : « Approchez-vous de lui (Jésus), pierre vivante, rejetée par les hommes, mais choisie et précieuse devant Dieu. Et vous-mêmes, comme des pierres vivantes, édifiez-vous pour former une maison spirituelle… ». Ces paroles nous renvoient à la nature spirituelle de l’Eglise. Cette image, qui renvoie aussi bien à une construction qu’à une communion, souligne avec force que l’Eglise n’est pas seulement un bâtiment, un lieu de prières et d’adoration, une institution qui rassemble tous ceux qui se réclament du Christ dans une association cultuelle donnée. Elle est une communion spirituelle de frères et sœurs en Christ ; des frères et des sœurs comme vous et moi, imparfaits. De ce fait, elle ne sera jamais parfaite en ce monde. Cette « Eglise communion » est aussi universelle, c’est-à-dire qu’elle nous dépasse, qu’elle traverse tous les âges, toutes les cultures, toutes les époques. Mais localement, elle est une « maison spirituelle » où chacun a sa place, son utilité, son service. Nous sommes donc invités à être des pierres vivantes en Jésus Christ, de cette église à Issy-les-Moulineaux. Par la foi dans le sacrifice du Christ, nous devenons enfants de Dieu, et nous sommes appelés à devenir des pierres vivantes pour constituer l’église locale dans sa dimension spirituelle. Et dans cette église locale, nous sommes invités à nous édifier, nous encourager mutuellement : à nous rapprocher les uns des autres, à nous lier les uns aux autres, conscient que lorsque je dénigre un frère ou une sœur, lorsque je l’ignore, je ne suis plus une pierre vivante ; lorsque je ne participe pas à la vie de l’église, par mon service, mes prières, mon amour, je ne suis pas une pierre vivante. Je suis une pierre posée à terre, mais pas dans l’édifice, c’est-à-dire sans utilité. Mais ce n’est pas ce que Dieu veut. Dieu nous invite ce matin à être des pierres vivantes de notre église locale à Issy-les-Moulineaux : « Approchez-vous de lui (Jésus), pierre vivante, rejetée par les hommes, mais choisie et précieuse devant Dieu. Et vous-mêmes, comme des pierres vivantes, édifiez-vous pour former une maison spirituelle… ». C’est notre vocation, notre appel, à nous qui avons décidés de faire partie de cette église. Voilà ce que devrait être notre église ici, toutes les églises.
Conclusion :
Bénissons Dieu pour l’église, pour ce lieu qu’il nous donne, pour sa présence dans ce lieu, selon sa promesse « Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux ». Réalisons le privilège qui est le nôtre, de pouvoir être là, dimanche après dimanche. Parce que chaque fois que nous nous rassemblons ici, le Seigneur est là, au milieu de nous. Et nous pouvons le prier, ici et partout.
Ayons toujours ce désir, cette soif de nous rassembler en ce lieu.
Encourageons-nous mutuellement, participons à la construction de cette église, à son témoignage, son rayonnement, en communion avec toutes les autres églises du Christ. Soyons des pierres vivantes !
Pasteur Joël Mikaélian 27/10/2024