Gen. 3. 1 à 5 / Marc 9. 32 à 37
« Qui est le plus grand ? »
Question d’actualité, question qui traverse les siècles, les lieux, les cultures. Question au cœur des relations humaines. Question qui génère conflits, division, séparation, oppression, guerre. Question qui pollue les relations humaines, au sein même de toute vie sociale, collective, ecclésiale, familiale même. Qui est le plus grand, qui est le meilleur ? Sous-entendu, qui va pouvoir dominer les autres ? La classe politique n’est pas en reste dans ce domaine, pas plus que les nations qui s’entredéchirent, s’entrechoquent. Nos sociétés également ne sont pas en reste sur la question. Le désir de toute puissance conduit l’être humain aux pires excès. Témoin l’actualité en France, les procès en cours qui témoignent des drames, des horreurs que des humains peuvent imposer à d’autres en position de faiblesse. L’orgueil, le péché par excellence peut être, en est la cause profonde ; tapis au fond du cœur humain depuis le jardin d’éden. « Vous serez comme des dieux… » disait le serpent à Eve. L’orgueil, peu ou prou présent en chacun de nous ; comment y échapper, le dominer, le vaincre ?
1°) « De quoi discutiez-vous en chemin ? » disait Jésus à ses disciples
Jésus savait, il connaissait les pensées de ses disciples, il avait vu leur comportement dans bien des situations. Jésus connait bien la nature humaine, ayant accepté lui-même de revêtir cette nature pour nous en libérer. Il savait de quoi discutaient ses disciples. Il savait, mais il pose quand même la question. Il la pose pour que les disciples fassent eux même un travail intérieur, réalisent ce qu’ils sont en train de penser. Se regarder soi, c’est toujours là que commence tout travail de guérison intérieure. Plutôt que de faire la morale et de dire : « vous n’avez pas honte de vous disputer pour savoir qui d’entre vous est le plus grand ? Ce n’est pas bien !». Jésus renvoie chacun à lui-même. Et là, grand silence ! Silence oh combien salutaire. Silence qui témoigne d’une prise de conscience profonde. Car en fait, les disciples auraient très bien pu essayer de « botter en touche », évoquer d’autres sujets de discussions, ils auraient pu dire qu’ils parlaient de la pluie et du beau temps ! Mais non, c’est silence, parce que les disciples ont compris qu’il y avait là quelque chose d’essentiel. Qu’ils devaient absolument se remettre en question.
Question que nous pose le texte : « Vous croyez-vous plus grand que les autres, meilleur, au-dessus, au point de mépriser les autres, de les abaisser, ou de considérer qu’ils sont des êtres inférieurs à vous ? Croyez-vous que vous êtes plus spirituels que les autres dans l’église ? Et que de ce fait, vous pouvez mépriser les autres, les dominer, les regarder de haut ? ». C’est la question que nous pose la parole de Dieu aujourd’hui à travers ce texte. Faisons silence et écoutons ce que le Seigneur nous dit.
2°) « Si quelqu’un veut être le premier, il sera le dernier de tous, et le serviteur de tous ».
Jésus ne se limite pas à faire de la morale. Il va beaucoup plus loin que la morale. Il ne dit pas « ce n’est pas bien… vous n’avez pas honte… vous allez être puni… ». Non, la vie chrétienne, l’enseignement du Christ va au-delà de la morale et de la condamnation, au-delà du jugement culpabilisateur. Non, « Jésus s’assit… ». Il prend le temps, il va dire quelque chose d’important, il va donner un enseignement, une orientation, il va montrer une direction, une action à entreprendre, une action positive qui va être libératrice de l’orgueil. « Si quelqu’un veut être le premier, il sera le dernier de tous, et le serviteur de tous ». Quel message, quelle pensée ! On ne peut pas être plus « disruptif » ! En la matière, on peut dire que Jésus était un précurseur de ce concept moderne, à savoir, être disruptif pour amener le changement, un souffle nouveau… Mais à la différence de la pensée moderne, celle du Christ va bien au-delà de tous ce que les systèmes humains du changement préconisent. C’est une véritable révolution que Jésus préconise ici. Une révolution profonde, sérieuse, concrète… Une révolution qui nous révolte peut-être ! Et l’on serait tentés de dire : « non, pas ça, pas jusque-là ! Je vais me faire écraser par les autres ! » Si l’on raisonne humainement, oui. Un tel choix serait suicidaire. Mais l’on n’est pas ici dans un raisonnement humain, mais dans un raisonnement spirituel. Un raisonnement qui se conjugue avec la foi, qui s’inscrit dans une logique spirituelle. Une logique féconde. Il ne s’agit pas de s’écraser ou de se laisser écraser jusqu’à la dépression. Non ! Il s’agit d’adopter une attitude positive, d’initier une action positive envers les autres. Il s’agit de se mettre au service de l’autre, de mon prochain, de cet autre différent de moi, peut être meilleur ou moins bien que moi, là n’est pas la question. Il s’agit de ne plus s’évaluer et d’évaluer les autres selon l’échelle des valeurs humaines. Oui, il est des gens plus doués que d’autres, il est des différences, des disparités entres les humains. Il est des gens plus intelligents que d’autres, c’est un fait. Qu’importe ! Il s’agit de s’accepter, tel que Dieu nous a fait, et de nous mettre au service des autres, sans envier, sans jalouser, ou sans essayer de dominer, ou de se valoriser, de satisfaire son égo. Il s’agit d’élever l’autre, surtout s’il est en position de faiblesse !
3°) « Et prenant un enfant, il le plaça au milieu d’eux… »
Etrange cette action dans la suite du récit. Ici, Jésus passe à l’action, de la théorie à la pratique. A plusieurs reprises, déjà, Jésus avait porté une attention particulière envers les enfants. Il dira même que le Royaume de Dieu leur ressemble, qu’il nous faut même devenir comme des petits enfants pour entrer dans le royaume de Dieu. Pourquoi ? Tout d’abord, parce que le salut est une question simple, parce qu’il suffit de croire pour entrer dans le royaume de Dieu. Il suffit de croire que le Christ a donné sa vie sur la croix pour nous sauver, nous libérer de la condamnation qui pèse sur nous à cause de nos fautes, de notre orgueil. Pourquoi porter attention aux enfants ? Parce que tout enfant, tout être humain est créature de Dieu. A ce titre ils ont tous la même valeur à ses yeux. Même un enfant, considéré comme insignifiant à l’époque de Jésus, même un enfant a autant de valeur, sinon plus qu’un adulte. Et à ce titre a droit au même respect, à la même considération qu’un adulte. Tout enfant a droit au respect, a droit à être protégé, éduqué, à vivre de manière décente. Tout enfant a droit également à connaître la vérité, la bonne nouvelle de l’évangile. Avoir le choix de croire personnellement. C’est ce que l’église offre chaque dimanche, ce que nos centres de vacances offrent chaque été. Tout enfant a droit à nos prières et à notre affection. « Prendre un enfant par la main, pour l’emmener vers demain, pour lui donner confiance en son pas… ».
Conclusion :
« Qui est le plus grand ? » Soyons vigilants/orgueil
« Si quelqu’un veut être le premier, il sera le dernier de tous, et le serviteur de tous ». Soyons davantage serviteurs les uns des autres que des concurrents, n’hésitons pas même si cela nous paraît trop « disruptif » comme comportement « Dieu résiste aux orgueilleux, il fait grâce aux humbles », mettons-nous au service les uns des autres, avec joie, espérance, confiance
« Ayez en vous les sentiments qui étaient en Jésus Christ (Phil. 2. 5)
Pasteur Joël Mikaélian 29/06/2024